Bialowieza aux couleurs brèves de l'automne Du 29/09/2012 au 13/10/2012
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Faunes et paysages merveilleux sont au détour de chacun d'eux.
Bialowieza aux couleurs brèves de l'automne
Du 29/09/2012 au 13/10/2012
Préambule : Ce carnet de voyage est différent des autres. C'est avant tout une invitation à découvrir cette somptueuse forêt qu'est Bialowieza en automne. Dans ce voyage, ne cherchez pas à savoir combien nous étions, en fait, j'étais seul, ce sont mes vacances ! Et oui, même en vacance j'explore ces endroits extraordinaires oubliés du monde des hommes ! Bialowieza n'est pas une forêt d'Europe, c'est La Forêt ! Je vous invite à la découvrir à travers ces quelques lignes et photos, en espérant vous donner l'envie de la découvrir par vous-même. Lisez ce carnet et place à la rêverie...
Le 29 septembre 2012
Arrivé à Varsovie à 12h55, je prends la direction de Bialowieza. Deux heures se passent avant de quitter les faubourgs de Varsovie à cause des travaux de rénovation de la chaussée. À 19h27, j'arrive chez mes amis. Là, je rencontre un jeune couple de touristes logeant chez eux. Nous mangerons ensemble tout en faisant connaissance.
Le 30 septembre 2012
Le lendemain, je pars en forêt à 7h15. La forêt s'éveille, les oiseaux s'activent et j'observe des pics épeiches qui décortiquent des cônes d'épicéas.
Les paysages automnaux sont splendides. Je me rends sur l'un des territoires de loups que je connais le mieux, on ne sait jamais...
Je rentre dans les sous-bois, attiré par un bruit qui me semble être celui d'un bison.
Rien. Je continue de m'enfoncer dans les profondeurs forestières, où la nature m'ouvre un couloir entouré de verdure. J'y trouve une mâchoire de cervidé qui me rappelle que voilà maintenant trois décennies que j'arpente les forêts en Europe, et que, ô grand jamais, je n'ai trouvé le reste. Quand je dis le reste, en fait je pense à un cerf mort ayant conservé ses bois sur le crâne. Là, je me retourne et, surprise, je vois tout le squelette d'un cerf prédaté par les loups, peut-être au début de ce mois. Avec ses bois intacts, il s'agissait d'un magnifique douze cors.
Je m'empresse de ramasser le crâne et de filer à la voiture. Juste un petit souci quand même, elle se trouve à 8 ou 9 km de ma position. Je fais à peine 200 mètres que là, je croise une couleuvre à collier d'environ 1 mètre.
De retour à la voiture, une autre surprise m'attend. Ma trouvaille ne rentre pas dans le coffre aussi finira-t-elle sur la banquette arrière, recouverte d'une toile de camouflage. Et hop, chez mes amis. Après avoir déposé le crâne, je repars en forêt en direction du nord, vers la rivière Narew. Là, il y a un endroit pour les bisons, les cervidés et les sangliers. Il est aussi possible d'y observer des castors au travail.
Le 1 octobre 2012
Au petit matin, je me dirige vers le charnier à loups, mais aucun bison et encore moins de loup. Rien ne déguerpit ! D'ailleurs, le charnier n'est pas approvisionné.
Malgré tout, une belle atmosphère automnale, une légère brume, une gelée blanche et un grand ciel bleu suffisent au ravissement des yeux....
Plus loin, je découvre des traces de loup qui semble être un bel adulte. Des rêves plein la tête, qui sait, je le croiserai peut-être au détour d'une sente.
L'après-midi, je m'éloigne encore plus au nord que la veille. C'est une excellente place pour les bisons et les loups. Sur le chemin, deux écureuils rongent des cônes d'épicéas, un adulte et un jeune.
Je les observe 15 bonnes minutes et les laisse à leur festin.
J'arrive sur les lieux où j'aperçois une masse sombre se découpant sur la lisière mordorée, un superbe taureau qui doit bien approcher les 800 Kg.
Il est vraiment de toute beauté. Mais au bout de plusieurs minutes d'observation, un bruit gronde dans le lointain, un véhicule. Le bison relève sa tête massive et me voit. Maudite voiture ! Alors qu'il ne m'avait pas repéré jusque-là, le bison prend la fuite sans se presser...
Le 2 octobre 2012
Je pars à l'aube pour un lieu où je vois régulièrement des bisons et autres espèces... Malheureusement, rien ne bougera. Je change d'endroit, et je pars à l'approche à travers la frondaison. Des écureuils râlent sur mon passage et j'entends un loup qui hurle. Je reprends un chemin après avoir traversé les sous-bois. Un loup est passé ici il y a peu de temps car une laissée encore tiède, remplie de poils de cervidés, s'y trouve.
Je décide de me placer sur le chemin près d'un dôme. Malheureusement un véhicule arrive qui s'arrête au niveau de la laissée. Ce sont des biologistes qui prennent un échantillon et repartent. Décidément, je n'ai guère de chance. Pour moi, c'est mon affût qui est à l'eau !
L'après-midi, je décide de me rendre sur une grande plaine forestière que je connais bien. Par le passé, j'ai pu y observer de multiples fois des bisons, et parfois même des loups aux abords. Je traine avec moi un petit siège d'affût, et de toile de camouflage. Arrivé sur place à 15h, je m'installe au plus vite sans faire de bruit.
Les lieux sont plongés dans une quiétude extraordinaire. 1h30 s'écoule. Et voilà qu'un bruit de moteur se fait entendre. Un véhicule tout terrain traverse la plaine, s'y arrête. Un homme descend, ouvre le coffre, prend quelque chose et part en lisière. Il revient, range son attirail et repart dans un vacarme étourdissant. Je décide de partir car, de toute façon, dans peu de temps il fera nuit et, de plus,, la place empeste le gasoil. Je n'y crois plus.
Le 3 octobre 2012
Je pars dans le nord de la forêt où j'ai observé mon bison. Après 3 Km d'approche, j'arrive sur place. Rien. Je m'installe au pied d'un épicéa. 20 minutes s'écoulent quand un véhicule surgit non loin. Décidément, je dois avoir la poisse.... Il repasse de nouveau au ralenti, ceux sont des biologistes, équipés d'une antenne pour le radio trekking. Je repars plus haut après leur second passage, où je découvre des traces toutes fraîches de bison qui ne s'y trouvaient pas lorsque j'y étais passé tout à l'heure.
Je rentre dans l'épaisseur forestière afin de le pister, et j'entends de nouveau le véhicule passer au ralenti sur le chemin, alors que je m'enfonce dans les sous-bois.
Là, comme si cela ne suffisait pas à mon malheur, la pluie commence à tomber. Très vite, on passe de la légère ondée à une pluie diluvienne.
J'entraperçois une biche et une bichette qui vont se réfugier dans les profondeurs des taillis afin d'y trouver refuge.
Je mets au moins trois quarts d'heure à sortir de là et rejoindre le chemin. Arrivé à la voiture, je suis trempé jusqu'aux os. Il m'aura fallu en tout presque deux heures pour rejoindre mon véhicule. Je prends la décision d'attendre demain pour ressortir, peut-être fera-t-il meilleur.
Le 4 octobre 2012
L'aube pointe et il est grand temps de partir en forêt. Le long de la route, je croise 6 biches et leurs jeunes. Il fait encore trop sombre pour les photographier. Je pars à l'approche sur le chemin au loup que j'ai surnommé ainsi car la plupart de mes observations de loups se sont réalisées sur ce chemin ! Après 3 Km d'approche, j'entends un bruit ressemblant étrangement à celui d'un sanglier. Ô surprise, ce n'est pas un sanglier mais un bison qui se tient à 5 ou 6 mètres de moi. Malheureusement, il me repère et prend aussitôt la fuite.
J'observe différents oiseaux, dont des pics épeiches, pics mars, mésanges nonettes...
Après cette approche, je me rends au grand lac. Sur le trajet, je croise 4 grandes aigrettes, une buse et une pie-grièche grise. Arrivé sur place, le lac est comme enveloppé dans un voile brumeux. Plusieurs grandes aigrettes, en compagnie d'aigrettes garzettes et de hérons cendrés, s'y trouvent.
Le soir, mon affût ne donnera rien.
Le 5 octobre 2012
Un grand vent a soufflé une bonne partie de la nuit. Un arbre en travers de la route me barre l'accès et je suis obligé de faire demi-tour. Je suis sur un tapis de feuilles jaunes, on pourrait croire que le chemin s'est revêtu d'une fine couche d'or.
J'arrive sur un autre lieu un peu tardivement avec le temps que j'ai perdu à tout contourner. Rien ne bougera, le vent souffle encore beaucoup. D'un seul coup, un énorme sanglier coupe le chemin où je me trouve, puis un second nettement plus petit que le premier.
Pour midi, je suis rentré chez mes amis et je m'interroge sur le restant de la journée ! Le soleil revient vers 15h30. Je file en forêt où je flânerais jusqu'en début de soirée.
Le 6 octobre 2012
L'aube pointe lorsque je prends la direction de la forêt. Dans une plaine, une ombre massive se détache, c'est un bison qui se tient là devant moi, un superbe taureau. Il remonte tout doucement vers la lisière. Je le suis tant bien que mal. Il s'arrête à plusieurs reprises pour me regarder et ne pas me perdre de vue. Sur ma droite, un second taureau remonte lui aussi sur la forêt. Ils finiront par disparaître.
Dans l'après midi, je me dirige plein nord de la forêt. Divers oiseaux croisent mon chemin : bouvreuil pivoine, une superbe observation de pic noir, des dizaines de geais.
Au loin, apparaît un jeune cerf. Peut-être porte-t-il 4 ou 6 cors.
Le 7 octobre 2012
Une magnifique matinée s'annonce. Je prends la direction nord-est. Le soleil illumine la grande sylve de mille feux. C'est un fabuleux spectacle qu'il aurait été dommage de manquer.
Un cerf brame non loin de moi à peut-être 3 ou 400 mètres. Je retourne sur mes pas. À un moment donné, une forme grisâtre se confondant à merveille avec ce décor chaotique d'arbres morts, de branches cassées, et de verdure attire mon attention. Pourtant cela ne bouge pas, mais à mes yeux cela détone comme une anomalie dans le décor, cela ne colle pas, je regarde aux jumelles.
C'est une biche qui se tient immobile. Je regarde ici et là, et voilà une autre forme immobile. Cette fois, je viens de retrouver le cerf qui donnait son aubade il y a à peine 15 minutes. Il est de toute beauté, c'est vraiment le seigneur des lieux. Il porte 14 cors sûr, peut-être même 16, quel bel animal !
À un bon kilomètre de là, des sangliers se frictionnent d'après leurs cris. Je continue dans l'espoir de les apercevoir. J'entends un léger bruit, je rentre à couvert. Des silhouettes apparaissent, des biches, un jeune cerf, et un second cerf, mais celui-ci de belle taille. Ils se poursuivent, s'arrêtent et repartent comme un jeu de séduction. Au même moment, 3 sangliers se faufilent dans leurs pattes, et finissent par disparaître.
De nouveau un bruit, mais celui-ci vient du haut d'un arbre. Un pic épeiche décortique un cône d'épicéa. Au même moment, sur la sente, une biche et son jeune se trouve immobile, juste le temps de prendre une photo du jeune, puis c'est un jeune cerf qui leur emboîte le pas.
En fin d'après-midi, je vais faire un tour sur l'un des territoires de loup que je connais bien. Là, une ombre furtive passe à travers la verdure, c'est un loup. En fait, je viens de surprendre une partie de la meute.
Je les observe pendant presque 1 heure, Ils feront des allers-retours en disparaissant et réapparaissant dans la végétation.
Puis deux biches traverseront devant moi alors que le soleil se couche.
Le 8 octobre 2012
Je trouve une laissée de loup toute fraîche sur un chemin, où, quelques jours auparavant, j'en avais déjà trouvée une. Puis voilà les traces qui sont apparemment celles d'un bel adulte. Je continue mon chemin et, dans le lointain, 2 chevreuils sortent pour rentrer presque aussitôt.
En revenant sur mes pas, c'est un renard qui apparaît sur le chemin, et, au même moment, 2 pics tridactyles se posent à mes côtés, c'est une magnifique observation !
Je m'arrête sur le chemin du retour dans un endroit où je n'ai pas mis les pieds depuis 20 ans passés. Les lieux ont bien changé et, de plus, il y a maintenant des terriers de renards habités, au vue des traces toutes fraîches aux entrées et des grattis. C'est bon à savoir pour l'avenir !
L'après-midi, j'observe des oiseaux dont une très belle observation de pic épeiche, des mésanges et un vol de grues en pleine migration.
Le 9 octobre 2012
Au petit matin, je surprends deux magnifiques bisons couchés sur une prairie à quelques mètres. Le jour se lève petit à petit et les bisons se lèvent et commencent à pâturer, tout en se rapprochant de la lisière.
Je les suis en gardant une certaine méfiance car ils me surveillent en me regardant régulièrement. L'un d'eux me paraît avoir une boiterie à l'antérieur gauche. Le deuxième se recouchera à quelques mètres. Apparemment, il ne me considère pas comme un réel danger !
J'assiste au lever du soleil sur la lisière et, à cet instant magique, un vol d'oies cendrées passe dans ce ciel orangé. Quel magnifique spectacle !
Un dernier regard sur ces deux magnifiques bisons qui regagnent la quiétude de la grande sylve de Bialowieza, l'un des derniers bastions de cette espèce venue tout droit des âges farouches...
Avec mes amis, nous nous rendons sur leur nouvelle propriété qu'ils viennent d'acquérir à une soixantaine de kilomètres de Bialowieza, non loin de la frontière biélorusse. De la propriété, un chevreuil s'enfuit. Tout le chemin de terre a été laminé par les sangliers. On trouve un enfourragement pour les animaux en face. Une petite rivière traverse la propriété, et les castors y ont élu domicile.
Ce sera un emplacement idéal pour les affûts aux castors, loutres, etc...
Cette après-midi je retourne dans le secteur du charnier à loups où je surprends une compagnie de sangliers qui se nourrissent dans le sous-bois entre les deux prairies. Apparemment il n'y a qu'un seul adulte, la laie, et ces bêtes rousses, en tous 7 individus.
Le 10 octobre 2012
Je pars pour le nord de la forêt. Arrivé sur place, trois biches traversent. Sur la prairie, je vois 4 bêtes de compagnie qui la traversent. Je repars et, en arrivant à un carrefour, 5 biches et 1 cerf se tiennent sur le talus, regardant mon véhicule. Ils finissent par s'en aller.
Cela fait une dizaine de jours que je suis arrivé, et la forêt s'est parée de ses plus beaux atours. Elle étincelle de mille feux, c'est l'une des plus belles époques de l'année.
La forêt, à l'instar de la palette d'un peintre, passe du jaune, au rouge, à l'ocre, aux nuances orangées, voire même grenat, sans oublier les différents verts qui s'agrémentent de teintes bleutées.
Dans les sous-bois, nous pénétrons dans le salon d'une parfumerie où mille odeurs se dégagent et se mélangent à celle de l'humus.
Mais aussi s'émanent les effluves des divers champignons, certaines aux notes poivrées, ou encore d'amandes fraîches, sans parler de la fameuse herbe à bisons et des divers menthes qui embaument intégralement la grande sylve...
Le 11 octobre 2012
Une biche traverse une prairie devant moi avant de se mettre à couvert sous les arbres plus que séculaires.
Une myriade d'oiseaux s'affaire dans les sous-bois. Certains chassent les derniers insectes, d'autres décortiquent les cônes d'épicéas ou bien encore, certains cherchent dans les troncs morts des larves de coléoptères....
Tout au long de cette journée, j'ai flâné parmi ces arbres géants, observant les oiseaux, les écureuils, simplement à profiter de l'instant présent, m'imaginant ce que ces arbres avaient bien pu voir depuis ces trois ou quatre derniers siècles de leur existence, moyenne de l'âge des chênes de Bialowieza.
J'aime imaginer que peut-être, certains de ces chênes ont vu à leur ombrage les derniers aurochs sauvages en sachant que le dernier individu libre connu a été tué dans la forêt de Jaktorow, en Pologne, en 1627.
Le 12 octobre 2012
Il fait encore nuit, mais l'aube ne va pas tarder. Je prends la direction de la forêt. Deux chouettes chevêchettes se répondent, puis une troisième vient se joindre à la joute sonore...
Tout en faisant mon approche, je m'arrête régulièrement pour écouter. J'entends des cerfs bramant, des sangliers se frictionnant, mais là, c'est un loup qui hurle, puis un deuxième.
Mais ils sont bien trop loin pour que je puisse essayer de m'en approcher. Non loin de moi, il y a une clairière. J'en prends la direction. Arrivé sur place, je distingue deux bisons drapés par la brume. Ils sont vraiment de toute beauté.
Petit à petit, je m'approche. L'un d'eux viendra presque à moi tout en broutant alors que je m'étais accroupi afin de casser cette forme humaine que les animaux fuient et évitent.
Je les accompagne durant 45 minutes, puis ils pénètreront dans un marais. Là, je ne peux les suivre dans ce genre de milieu, dense et impénétrable, sans avertir toute la forêt de Bialowieza de ma présence.
Mon affût du soir ne donnera rien, hormis les chouettes chevêchettes qui chantent et se répondent...
Le 13 octobre 2012
Ma dernière sortie en forêt. Et oui toute bonne chose a une fin ! Pour ce matin je retourne où j'ai surpris les deux bisons le 09 octobre. J'arrive sur place alors qu'il est à peine 6 heures.
Je distingue deux formes, ils sont encore là !
Pour cette dernière fois, je les suivrais pendant 2 heures, comme un cadeau d'adieux.... Entre temps, des grues nous passent au-dessus, se dirigeant plein sud.
C'est encore dans la forêt marécageuse qu'il est devenu difficile de les suivre sans avertir toute la forêt de mon passage, bois morts, sol spongieux, rivière à traverser, bref, quand on désire être silencieux, c'est le genre d'endroit à éviter.
Je prends la route vers 13 heures, direction Varsovie. Maintenant, il va falloir attendre le mois de février avant de revenir à Bialowieza...